La participation est une préoccupation de longue date, qui était au centre du projet associatif. Parmi les interrogations se trouvait la place à accorder aux familles tant dans les établissements que dans les instances dirigeantes de l’association.
La qualité de l’accueil a rapidement été repérée comme une condition indispensable à la participation. Elle favorise l’instauration d’un climat de confiance, d’échanges. « On s’est reposé la question des conditions d’accueil et du premier accueil. Puis, la journée associative de 2022 a fait émerger l’enjeu des petits accueils du quotidien », se souvient Philippe Roche, vice-président des PEP 01.
La réussite de l’accueil est principalement une question de posture professionnelle. Pour graver ces principes dans le marbre, les PEP ont formalisé une charte de l’accueil. Sa rédaction est le fruit d’une démarche participative, démarrée à partir des échanges de la journée associative de 2022 et alimentée par le travail d’administrateurs, de cadres et de membres du CSE.
Le document final comprenant dix points synthétiques résume le pourquoi et le comment de l’accueil aux PEP 01. « C’est une référence, une boussole, une ligne de conduite », indique Philippe Roche. Bien qu’il s’adresse aux professionnels, les familles auront connaissance de cette démarche. Des tirages grand format de la charte seront affichés dans chaque structure. Le document, validé par le conseil d’administration en novembre, sera ensuite présentée dans les établissements début janvier.
charte d’engagement collectif accueil
Le second projet, mené en lien avec les PEP Savoie Mont-Blanc, s’intéresse à la bientraitance et la prévention de maltraitance, question qui traverse beaucoup d’acteurs du secteur. « On ne peut raisonnablement participer que là où on est en sécurité », résume Philippe Roche.
L’objectif était de s’appuyer sur les définitions légales des grands concepts (bientraitance, maltraitance…) et les besoins fondamentaux de l’enfant. « La bientraitance est une culture institutionnelle qui part du sommet de l’association et concerne l’ensemble », explique Francis Feuvrier, directeur général. Il était nécessaire pour les PEP 01 de travailler sur ces questions et de réaffirmer des lignes directrices pour créer les conditions de la bientraitance. La charte détaille trois grands thèmes : la question des droits des personnes accompagnées, l’attitude ainsi que la posture des professionnels et enfin les conditions pour favoriser l’autodétermination. Elle décline ensuite ces principes de manière concrète.
Pour aller plus loin, le 1er décembre, un séminaire a été organisé et a rassemblé les cadres des deux ADPEP sur ce sujet. La journée fut l’occasion d’échanger sur le document et de débattre autour de situations complexes (par exemple, la question de la contention, la gestion de parents en désaccord…) pour voir ce qui fonctionne ou pas, ce qui peut être maltraitant.
La charte de bientraitance entre désormais dans une phase de diffusion et d’appropriation. Elle sera présentée en janvier dans les établissements et services pour engager une discussion dans les équipes et prévoir un plan d’action, d’amélioration par structure. À terme, la charte sera incluse dans les livrets d’accueil des salariés et des bénéficiaires.
Papier crépon, crayons de couleur, ciseaux, colle chaude et feuilles séchées. En ce jeudi matin, l’ambiance est à la créativité en Activités de Jour Spécialisées (AJS) pour Quentin, Nicolas, Rémi et Valentin. Le petit groupe constitue le noyau dur du projet des gardiens du marais, ponctuellement ouvert à d’autres. Leur mission ? Réaliser des masques couvrant la moitié du visage à l’effigie de ces fameux gardiens.
Derrière ce nom, pas de superhéros, mais un projet collaboratif à dimension artistique et pédagogique. Tout a commencé il y a quelques mois quand Christophe Noiret, enseignant spécialisé, est contacté par Sandrine Willay du Conservatoire d’espaces naturels Rhône-Alpes. À quelques pas de l’IME, la zone de promenade du marais de Vaux, souvent fréquentée par les jeunes, va être étendue. Des points d’informations sur la faune et la flore seront installés le long de la boucle de plus de 9 km. Ces espaces seront agrémentés de totems représentant les gardiens du marais où figureront par endroits des photos des artistes arborant fièrement les masques créés par leur soin à l’effigie de ces fameux gardiens.
Une créativité sans limites
L’initiative, originale, locale et développant l’intérêt des jeunes pour les espèces animales et végétales du secteur, a été adoptée. En octobre, l’IME Dinamo Pro se lance dans l’aventure en partenariat avec le collège. « C’est un projet fil rouge que l’on travaille à long terme », explique Cécile Defay, éducatrice encadrant les AJS. La finalisation du site n’intervenant pas avant 2024 voire 2025, une exposition des créations pourrait être organisée à l’IME au printemps pour valoriser le travail.
Les créations ne sont pas bridées : chacun peut confectionner des maques autant qu’il le souhaite. Certaines sont individuelles, comme celles faites de branches et de feuilles séchées, réalisées par Quentin. D’autres sont le résultat de l’inspiration de plusieurs jeunes. Ce matin, Rémi et Valentin ont jeté leur dévolu sur un nouveau masque reprenant les traits d’un héron cendré. Mais plutôt que de respecter les couleurs à la lettre, le masque sera divisé en deux : une partie traditionnelle et une aux couleurs plus originales. Une fois le travail terminé, il sera temps de poser pour la photo immortalisant la création.
Comme d’habitude, les AJS ont misé sur la récup’. La matière première pour les masques a été collectée lors de promenades, mais aussi chez les collègues des ateliers espaces verts ou menuiseries. Ces derniers ont été sollicités pour couper des pièces à la bonne taille. « On a beaucoup travaillé autour du naturel, de la faune et la flore du marais de Vaux », explique Cécile Defay.
Ici, tous n’ont pas forcément de fibre artistique. « Ça permet de les stimuler. D’où l’importance de décomposer l’activité de partir de choses simples », ajoute Delphine Guy, éducatrice arrivée récemment en AJS après des années côté hébergement. Pour que l’alchimie prenne, il est nécessaire de trouver le bon équilibre entre aider les jeunes, leur proposer différents outils et laisser leur créativité s’exprimer. L’autre atout du projet est de faciliter les passerelles avec la classe. Il servira de base pour travailler sur les différentes espèces d’un point de vue plus pédagogique.
Les AJS font partie intégrante des apprentissages. Ses professionnels sont sollicités par les enseignants ou les éducateurs techniques en fonction des besoins repérés chez les jeunes (travailler la concentration, la socialisation, l’expression, trouver du répit…) Des groupes aux caractéristiques communes sont créés et proposent des activités variées : travaux manuels, jeux de société, théâtre, comtes…Les jeunes y viennent entre une et trois fois par semaine. La dynamique est pensée en lien avec les enseignants pour voir la progression des jeunes et pouvoir réajuster les activités, les groupes et les temps de présence.
À Dinamo Pro, les jeunes sont orientés sur différents ateliers professionnels. Dès 16 ans environ, en fonction de leur profil et de leur maturité, des stages leur sont proposés dans leur domaine d’activité afin d’appréhender l’univers de l’entreprise. Le point de départ est le désir du jeune, en lien avec leurs capacités.
La première mission du coordinateur de stage est de mener des démarches auprès d’entreprises dans le milieu protégé (qui occupe 70 % de l’activité) et ordinaire pour trouver des débouchés correspondant aux besoins de chaque jeune. Dès le printemps, il contacte les ESAT et les entreprises adaptées afin de programmer des stages de trois semaines à un mois pour l’année suivante et d’organiser les accueils en foyer d’hébergement. Ils s’occupent ensuite de chercher des stages en milieu ordinaire.
Inutile de prospecter à vide. Pour dénicher le bon stage, il faut amener le jeune, tomber au bon moment et créer du lien. « J’y vais, je me présente et je regarde si les tâches correspondent au jeune. On trouve toujours des postes de travail qui collent à leurs profils variés », précise Bruno Pellizzoni, coordinateur de stage à Dinamo Pro. « Il faut connaître un peu tous les métiers, montrer qu’on parle le même langage. »
La clef de la réussie est de créer une relation de confiance. En amont, il est parfois utile d’expliquer les particularités des jeunes pour dissiper d’éventuelles craintes et faciliter leur accueil. « Ce qu’attendent les employeurs de nous, c’est de la réactivité et un accompagnement. Il faut qu’on soit là quand ils ont besoin », souligne Jean-François Roy, responsable de territoire sur Dinamo Insertion Pro.
Les retours sont souvent positifs, car les savoir-être sont là. « Les entreprises ont du mal à avoir des jeunes assidus. Les nôtres sont là tous les jours, ont envie de bosser. On tire notre épingle du jeu. Ils ont des difficultés, mais les entreprises peuvent avoir confiance. Régulièrement, en milieu ordinaire, elles sont surprises des échanges qu’elles peuvent avoir avec les jeunes », témoigne Bruno Pellizzoni. « Les jeunes ont besoin que ça colle au niveau relationnel. On a pu mettre fin à des stages rapidement parce que le courant ne passait pas. Parfois, il faut savoir trancher », complète Jean-François Roy.
La réussite des stages implique des liens fréquents avec les entreprises, les familles et beaucoup de déplacements. Bruno Pellizzoni évoque ce jeune avec des troubles autistiques qui doit être accompagné au train à Ambérieu puis cherché à la gare de Bourg pour le conduire jusqu’au lieu du stage. « Il faut prendre ce temps pour ne pas mettre le stage en échec. Ensuite, des routines se mettent en place », relève-t-il.
Le nombre de stages varie en fonction de jeunes. À Hauteville, certains n’ont connu que 2 ou 3 lieux de stage où ils ont renouvelé leur expérience. Un calcul rapide a permis d’estimer que les sortants de l’atelier cuisine ont cumulé 6 mois de stage dans leur parcours. D’autres ont expérimenté jusqu’à huit lieux de stages différents.
Initialement, Passerelle, c’était ça : des Appartements pour Jeunes Majeurs (AJM) sur la Côtière. Mais le service s’est transformé en dispositif. Ouverture d’une Equipe Insertion et d’un Foyer Semi Autonomie en 2 ans. Après un premier logement à Ambérieu, d’autres sont arrivés dans ce secteur où les besoins sont nombreux. Désormais, le dispositif Passerelle a pris ses quartiers sur la commune d’Ambérieu en Bugey. il ne reste qu’un appartement à Montluel et un à Saint-Maurice-de-Beynost. « Le service n’est pas là pour extraire le jeune de son milieu. On doit mettre toutes les chances de son côté », insiste François Exposito, chef de service. « Il faut prendre en compte l’environnement dans sa globalité : la famille, le réseau, le projet professionnel… », complète Cécile Diestro, CESF.
Les Appartements Jeunes Majeurs, se sont huit appartements pour des jeunes entre 18 et 21 ans, sous contrat avec le Conseil Départemental. Notre priorité est que le jeune s’approprie son logement. Pour certains, le passage d’une vie en collectivité à la liberté et la solitude d’un appartement peut être difficile à gérer. « Sur le service AJM, la donne de la prise en charge s’inverse. En MECS, l’éducateur sollicite le jeune. Ici c’est le contraire », décrit François Exposito.
Outre l’entrée dans le logement, le suivi individualisé démarre par la découverte de l’environnement, l’ouverture des droits avant d’entrer dans le projet professionnel ou de formation. Une attention est aussi portée au soin, la gestion budgétaire et administrative. « On avance par étapes et la fréquence varie selon l’autonomie. Les rendez-vous peuvent se faire à domicile, sur le service ou à l’extérieur. Nous organisons des temps collectifs comme des ateliers cuisine », explique Cécile Diestro.
C’est pour anticiper la transition vers l’autonomie et la sortie qu’a été développé le Foyer Semi-Autonomie. Ce sont 3 logements 5 jeunes (bientôt 6) âgés de 16 à 18 ans depuis le 1er décembre 2022. Tous ont un projet scolaire ou professionnel en tête. L’équipe œuvre pour faciliter l’avenir en travaillant sur le logement, les courses, la cuisine ou encore la gestion de la solitude. Une attention particulière est portée au budget afin de préparer le futur.
Si le Foyer Semi-Autonomie. reste un foyer avec ses règles et la présence continue d’éducateurs, les jeunes ont moins de barrières. Ils peuvent ainsi inviter des amis, leurs familles… « Ça leur a permis de gagner en liberté, de se créer un réseau à Ambérieu, de les ramener dans une forme de normalité », pense François Exposito. « Certains jeunes ont dit que pour la première fois, ils se sentaient chez eux », ajoute Claire Lagrange, éducatrice spécialisée. Les logements ont été conçus pour que les jeunes se sentent bien et ils ont reçu 100 euros pour décorer à leur goût.
Du côté des professionnels, le fonctionnement du Foyer Semi-Autonomie a demandé un ajustement. Avec 5 jeunes pour 2 éducateurs attitrés, ils ont plus de temps pour les accompagnements, mais ont dû apprendre à être plus souples, à laisser les jeunes expérimenter. « Les appartements ne sont pas toujours impeccables, mais les éducateurs ne seraient pas dans leur rôle si c’était le cas ! Il faut pouvoir tolérer 1, 2 jours avant d’intervenir », décrit François Exposito. Une relation de confiance s’est créée, renforcée par la stabilité de l’équipe. « Les jeunes apprécient qu’on s’adresse à eux comme des adultes. »
L’équipe trouve son origine dans la stratégie de lutte contre la pauvreté qui prévoit d’agir contre les sorties sèches de l’ASE à 18 ans. Or, des actions devaient être mises en œuvre avant fin 2021. C’est pourquoi les PEP 01 ont proposé de démarrer l’équipe insertion en novembre de cette année. Elle s’adresse aux jeunes avec une problématique de décrochage scolaire ou d’insertion sociale. Ils sont orientés par le travailleur social chargé de la mesure, d’un placement ou d’une Action Educative en Milieu Ouvert (AEMO) , s’il est en difficulté face à ce sujet.
Cinq jeunes de 16 à 18 ans peuvent être accompagnés entre 6 mois et 1 an. « Au départ, ils viennent, on discute, on leur présente le dispositif, nos façons de faire. On leur montre qu’ils ne retrouveront pas ici ce qu’ils ont quitté ou ce qui leur fait peur », résume Amandine Raulin, éducatrice. « On prend le jeune tel qu’il est et on n’intervient pas sur le placement. Il peut déposer des choses. On va l’orienter et alerter si c’est quelque chose de grave » poursuit Delphine Briquet, monitrice-éducatrice.
Un projet construit avec le jeune et sa famille définit les besoins et cible tous les freins à l’insertion. Par exemple, avec un jeune impulsif, des activités pour le canaliser pourront être proposées en préambule. L’approche est très individuelle. « On a du temps. On peut passer 9 à 16 heures avec le jeune. Ça n’a pas de prix, ça l’aide à raccrocher. » Cette façon de faire facilite l’instauration de la confiance. « On est attendus par tous : les familles qui voient que le jeune sort de son lit et les MECS qui n’ont pas le temps de travailler leur insertion », complète Amandine Raulin. Un lien hebdomadaire est maintenu entre toutes les parties prenantes pour que l’information sur la progression du jeune circule.
Après deux ans, les résultats sont positifs. Seuls 2 des 14 jeunes ont terminé leur accompagnement sans solution et les interventions de l’équipe ont évité des placements en institution en apaisant des situations tendues au domicile.
C’était une première ! Si Dinamo Sco comptait déjà une Unité d’Enseignement Externalisé (UEE) Elémentaire, l’équivalent en collège n’existait pas. Un constat s’imposait : face à l’évolution des besoins du public accueilli et de l’agrément, les jeunes ne quittaient plus l’IME à douze ans. Il était indispensable de proposer quelque chose à ces adolescents, notamment ceux passés par une UEE primaire.
« L’idée ici est de mieux connaître son environnement, d’être confronté à d’autres préados », explique Gwenaelle Moulin, cheffe de service à Dinamo Sco. Cette plongée inclusive est l’occasion de travailler les habiletés sociales, la relation avec les autres, avec des adultes et un cadre extérieur à l’IME.
L’information de l’ouverture de l’UEE est tombée en juin. « C’était un peu la panique au début. On ne savait pas où on allait les mettre ! », reconnait Xavier Roberto, gestionnaire du collège. Les enseignants s’interrogeaient sur leur rôle et le fonctionnement du dispositif. « Nous avons toujours reçu des élèves à besoins particuliers. Une fois que l’on nous a expliqué qu’il s’agirait d’inclusion dans l’établissement, que les jeunes seraient toujours accompagnés, les enseignants ont été rassurés. » La rentrée de septembre s’est déroulée sans heurt. Les six jeunes de l’IME, âgés de 12 à 15 ans, ont trouvé leur place et ont été intégrés aux temps forts du collège (journée contre le harcèlement, sortie d’intégration des 6e, cross). Des moments de rencontre avec chaque classe ont servi à répondre aux questions des élèves. « Le discours avait été construit avec les enfants de l’UEE pour savoir ce qu’ils voulaient dire, s’il fallait parler de handicap ou non », se souvient Gwenaëlle Moulin.
Avec des temps de scolarisation importants, les jeunes sont la majorité de la semaine au collège qu’ils quittent pour certains accompagnements à l’IME. Au collège, ils sont toujours encadrés par un binôme enseignante spécialisée et éducatrice. En plus de la classe, ils profitent aussi d’activités de jour spécialisées, plus orientées vers le versant éducatif et des suivis thérapeutiques et paramédicaux.
Pour simplifier l’intégration à la vie de l’établissement, les jeunes ont accès au système Pronote et déjeunent régulièrement à la cantine. Ils sont également inclus dans certains cours. Des matières comme l’art, la musique ou l’EPS ont été choisies pour ne pas les mettre en difficulté. « L’enseignante est venue en conseil pédagogique pour expliquer ce dont ils auraient besoin. Les enseignants étaient intéressés et ont tout de suite dit oui. Les disciplines choisies s’y prêtent bien », complète Xavier Roberto. « L’unité externalisée peut être rassurante, faciliter les choses pour des parents ayant une image négative de l’IME. »
Dans le même temps, les professionnels font attention à bien accompagner les familles. « Certains peuvent penser que leurs enfants ont le niveau pour retourner dans l’ordinaire puisqu’ils sont au collège. À nous d’ajuster, d’être transparents, de les ramener à la réalité pour ne pas les leurrer », poursuit Gwenaelle Moulin. « Le premier retour est entièrement positif. Les jeunes sont bien accueillis et s’intègrent bien au collège. On a l’impression qu’ils ont grandi en venant ici, qu’ils sont plus matures », conclut Stéphanie Cornaton, la principale.