Julie prépare actuellement son Bac Pro Gestion/administration au lycée de Valserhône, après un parcours inclusif sans faute.
Porteuse de trisomie 21, Julie a été accompagnée par une AESH au primaire, une ULIS Collège puis Lycée où elle a décroché un CAP Cuisine. Ses excellents résultats scolaires lui ont permis d’intégrer une 1ère Gestion/administration à l’issue de ce CAP.
Elle doit aujourd’hui réaliser des stages en entreprise qui feront l’objet d’une soutenance orale lors du passage des épreuves du BAC.
C’est donc en octobre dernier que le SESSAD Autisme accueille Julie pour la première fois. Son sourire, son caractère débonnaire et sa joie de rejoindre le monde professionnel ont fait l’unanimité auprès de tous les professionnels du SESSAD Autisme.
Elle a accompagné l’assistante administrative sur différentes tâches.
Elle a surtout su partager avec l’ensemble de l’équipe son parcours de réussites mais qui a parfois rimé avec la réalité bien sinistre de la société. Certains médecins, psychologues ou simples adultes croisés au jour le jour n’ont vu en elle qu’une enfant sans avenir.
Mais Julie ne juge pas, elle remercie.
Elle remercie tous ceux qui ont cru en elle : sa famille d’abord, convaincue qu’une prise en charge précoce et beaucoup de stimulation lui donneraient toutes ses chances ; les enseignants et les AESH qui ont répondu à ses besoins sans jamais la mettre à l’écart ; les éducateurs et thérapeutes qui lui ont donné les outils pour réussir et parfois accepter l’illusoire ; ses professeurs de théâtre et de piano qui n’ont jamais hésité à la mettre sur le devant de la scène.
Elle remercie tous ceux qui croisent sa route et l’accompagnent doucement vers ses responsabilités de jeune adulte.
Le 17 janvier Julie retrouve toute l’équipe pour une nouvelle période de quatre semaines de stage.
« Aujourd’hui nous souhaitons remercier Julie pour tous ces beaux moments partagés Elle nous a montré par son parcours que nos efforts au quotidien ne sont pas vains. Que la société inclusive n’est pas une utopie. Que les valeurs que nous portons sont à porter », explique Marie Catherine Boucher, Responsable de Territoire.
Au collège, les séances d’art plastique sont une révélation. Avec le soutien de ses enseignants, Mathis s’oriente vers une filière artistique. Le métier d’infographiste où l’on travaille principalement sur ordinateur semble fait pour lui. Il se dirige vers un bac pro en communication visuelle au lycée Arbez Carme d’Oyonnax où les débuts ne sont pas simples. « Certains professeurs se demandaient comment il pouvait être là, s’il n’y avait pas d’erreur d’orientation », se souvient Éliane Faillet, enseignante spécialisée au SIAAM. Rapidement, Mathis fait ses preuves. Ses camarades sont sensibilisés au handicap et des outils adaptés sont déployés. « Sur son ordinateur, Mathis zoome énormément. Ensuite, il se représente et assemble mentalement la globalité du document », précise Éliane Faillet, relevant la concentration nécessaire à cette gymnastique intellectuelle.
Pour que la création reste un plaisir, Mathis conçoit badges, logos ou porte-clefs pour ses proches, en plus des affiches ou dépliants réalisés pour ses études. Afin de rendre ses créations accessibles à tous, il intègre fréquemment le braille. Récemment, un stage à la Fondation Frédéric Gaillanne qui offre des chiens-guides aux jeunes malvoyants l’a conduit à réaliser des affiches et des cartes de vœux. Une expérience d’autant plus marquante que Mathis a son propre chien-guide depuis avril 2021 qui l’a fait gagner en autonomie et a réduit sa fatigue lors des déplacements.
Récemment, les PEP ont réuni un groupe de travail pour harmoniser l’utilisation du logiciel Médiateam. Il a conclu qu’un support de communication attractif et clair destiné des professionnels s’imposait. L’association s’est appuyée sur le savoir-faire de Mathis pour concevoir une plaquette et un sous-main. Couleurs, typos, agencement : il a laissé parler sa créativité. « J’avais les textes, les captures d’écran. Je me suis occupé de la mise en page, de trouver un fond pour que ce soit joli et que ça accroche. Ça m’a pris une dizaine d’heures par projet », explique Mathis. « C’était une expérience concrète dont j’ai vu l’aboutissement et qui m’a fait connaitre autre chose. » Cette belle réussite aide à briser les représentations en montrant qu’un jeune déficient visuel peut s’épanouir dans un travail visuel grâce aux outils à sa disposition.
L’art facilite les rencontres. Enseignant spécialisé, Christophe Noiret, arrivé à l’IME Dinamo pro en 2020, propose de développer un projet photographique. Le projet et le budget validés par le Responsable de Territoire, les séances ont pu démarrer dès novembre 2020. Afin de pérenniser la démarche, un dossier est constitué auprès du programme Interstices, regroupant des financements de l’ARS, la région et la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles).
Toutes les trois semaines, le photographe Christophe Bessard anime des séances à Hauteville. Après avoir choisi un objet qui les représente dans leur atelier, les jeunes le photographie dans un studio recréé à l’IME avec fond blanc et éclairages professionnels. Suivant les conseils de l’expert, ils apprennent à utiliser le matériel de manière autonome et à prêter attention au point de vue, à la lumière. Ce projet a donné lieu à des clichés agrandis et à des cartes postales imprimées, devenant un support d’écriture idéal en cours de Français.
Après les photos, place aux textes. Les participants ont travaillé ensemble pour trouver un titre à chaque œuvre. « On part de la raison pour laquelle ils ont choisi un objet, ce qu’il signifie pour eux. Ça leur permet de réfléchir sur eux-mêmes, sur leur place dans l’atelier », explique Christophe Noiret. Un gros plan de chaussures de service a ainsi été baptisé « Les petits pas. »
Mais le projet va bien plus loin qu’une simple sensibilisation à l’art. Il encourage l’ouverture culturelle, la réflexion sur le rapport à l’image, travaille la confiance en soi. Autant d’enjeux cruciaux pour cette trentaine de jeunes, âgés de 15 à 19 ans.
Pour sa deuxième année, « Dinam’objet » ne s’arrête pas là. De nouvelles séances photos ont été organisées pour ceux qui ont rejoint l’aventure.Des films d’animation vont être réalisés à partir d’une série de clichés décomposant un geste technique. Ces clichés pourraient aussi se retrouver dans des folioscopes. Pour sortir du studio, les jeunes ont été « lâchés » dans les ateliers appareils photo en main pour saisir des détails d’objets aux matières, couleurs et formes variées. À terme, une fresque grand format pourrait être conçue.
Après avoir affiché les photos à l’IME l’an dernier, les professionnels rêvent de partager ces créations avec l’extérieur en exposant par exemple au collège, au centre social d’Hauteville ou à la Marpa de Brénod, au siège de l’association. Un défi serait prévu pour les visiteurs : faire le lien entre les clichés et les titres imaginés par les jeunes.
Les jeunes ont été sensibilisés au vocabulaire technique et ont appris à monter un studio par eux-mêmes.
Pour penser ces changements, l’association est partie de diagnostics de terrain et de la stratégie nationale afin d’identifier les priorités déclinées en trois dispositifs. Le premier, le Dispositif les Ricochets, regroupe la MECS et le Safren. Le Second Dispositif Passerelle se destine aux 16-21 ans . Et enfin le dispositif OASIS (Offrir Attention, Soins, Inclusion et Sécurité dans le respect du parcours de l’enfant) aux jeunes de l’aide sociale à l’enfance en situation de handicap.
En proposant plus de réponses en élargissant ses domaines de compétence sur tout le Département, la plateforme sociale permet de penser l’enfant dans sa globalité et de gagner en souplesse. Elle renforce les liens entre structures en s’appuyant sur les compétences de chacun et en améliorant l’accompagnement.
Centré sur l’insertion et l’autonomie des 16-21 ans, le dispositif Passerelle intègre dorénavant les appartements jeunes majeurs. Ce dispositif s’enrichit depuis novembre 2021 d’une équipe d’insertion, basée à Ambérieu-en-Bugey. Elle accompagne cinq adolescents avec une mesure d’aide sociale à l’enfance . Un éducateur spécialisé et une chargée d’insertion accompagnent ces jeunes en rupture de parcours, sans projet scolaire ni professionnel. « Nous irons chercher ces jeunes là où ils sont, nous prendrons le temps de faire connaissance pour qu’ils reprennent confiance et s’ouvrent sur l’extérieur », détaille Peggy Ratigner, directrice de la plateforme sociale des PEP 01. L’équipe leur donne de nouveaux repères et interlocuteurs pour recueillir leurs envies avant de bâtir un projet en lien avec les professionnels des structures d’accueil.
Début 2023, le dispositif sera complété par un foyer en semi-autonomie destiné aux adolescents de plus de 16 ans de MECS avec un projet professionnel ou scolaire. En effet, le placement en structure collective ne permet pas suffisamment d’acquérir une autonomie des gestes du quotidien. Idéalement, cette structure protégée comprendrait des logements individuels pour préparer ces jeunes à gérer seuls le quotidien. Même si le poids du groupe sera bien moindre, des espaces collectifs seront aménagés pour éviter de les confronter à la solitude, facteur de stress. Situé à proximité du centre-ville d’Ambérieu, le foyer rassemblera une équipe de professionnels spécialisés : CESF, éducateurs spécialisés et chargée d’insertion.
Au sein du nouveau dispositif OASIS, l’équipe mobile, créée également depuis novembre 2021, se compose d’ un manager, une neuropsychologue, une éducatrice spécialisée et une assistante social (un poste en cours de recrutement)et d’une assistante sociale venus du milieu du handicap et de la protection de l’enfance. « Cela apporte une complémentarité de regards très importante pour ces enfants », estime Peggy Ratigner. Avant le lancement du service le 15 novembre, ces professionnels ont passé du temps en structures médico-sociales pour saisir les enjeux de ce public, ainsi qu’à la MECS pour comprendre son fonctionnement.
Ce service se destine à des jeunes de 6 à 18 ans avec une notification MDPH et relevant d’une mesure d’aide sociale à l’enfance. Les MECS, familles d’accueil ou famille « SAFRen » en difficulté peuvent solliciter le Département pour constituer un dossier d’admission vers l’équipe mobile. Elle peut suivre six enfants pendant trois mois, renouvelable une fois. « Nous avons la chance de ne pas être pris dans le quotidien, mais d’apporter un regard différent sur les soucis de l’enfant ou des accompagnants », résumé Peggy Ratigner.
Il arrive que les professionnels de la protection de l’enfance n’aient pas les outils pour répondre aux besoins de personnes en situation de handicap. De même, les savoir-faire de l’IME ne s’étendent pas forcément au côté « éducation familiale », présent en MECS. « Notre travail est de voir où sont les enjeux et comment favoriser la communication. Nous ne sommes pas là pour faire du renfort éducatif ou pour remplacer les éducateurs, mais pour les aider à comprendre ce qui pose problème ».
L’équipe mobile peut poser un diagnostic et construire collectivement des outils au service de l’enfant pour éviter une rupture de parcours. Pour y parvenir, elle met en lien tous les acteurs intervenant auprès de l’enfant. Les professionnels peuvent être mis à disposition jusqu’à deux jours par semaine. Présentée aux acteurs du secteur fin décembre 2021, cette équipe à dimension expérimentale commence déjà à recevoir des dossiers d’admission.
La prochaine étape pour OASIS sera franchie à la rentrée de septembre 2022 avec l’ouverture d’un foyer adapté. Il accueillera six jeunes confiés en MECS et porteurs de troubles neurodéveloppementaux.
Au-delà de ces nouveaux dispositifs, les PEP 01 réfléchissent à la question des jeunes majeurs sortis de l’aide sociale à l’enfance. Pour ces 18-21 ans, une solution d’hébergement d’urgence pourrait être envisagée. Elle les mettrait à l’abri temporairement pour acquérir des ressources et d’être dirigés vers des partenaires afin d’éviter qu’ils se retrouvent la rue.
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Éducatrice spécialisée, Anne-Laure Velon a intégré l’UEMA (Unité d’Enseignement Maternelle Autisme) d’Oyonnax à son ouverture, il y a trois ans. « Je ne connaissais pas le principe et je n’avais jamais travaillé dans la petite enfance ! », confie-t-elle. « Mais j’avais suivi des formations sur l’autisme en IME et j’avais envie de changement. Ce type de dispositif permet un accompagnement précoce et individualisé pour les enfants ! Basée à l’école Daudet Pagnol, l’UEMA accueille 7 enfants de 3 à 6 ans, accompagnés par une éducatrice spécialisée, 3 AES, une institutrice et un agent polyvalent. Une psychologue, une psychomotricienne et une orthophoniste interviennent à temps partiel.
Les professionnels partagent leurs journées entre des temps à l’UE et Des temps d’ inclusion à l’école. Dans le premier cas, le volet pédagogique est chapeauté par l’enseignante de l’UE. « Chaque jour, elle prépare une feuille avec le travail à mettre en place », détaille Céline Bedu, AMP à l’UEEA (Unité d’enseignement en élémentaire autisme) de Tenay. Reprisée à la rentrée par les PEP 01 et transférée depuis Lagnieu, la structure accueille 5 enfants de 8 à 10 ans, encadrés par 4 professionnels. À la rentrée 2022, deux jeunes supplémentaires rejoindront la structure. « Dès que l’on s’installe avec un enfant, on l’aide sur ses activités pensées par l’enseignante. Chacun est avec un élève. Quelqu’un d’extérieur ne saurait pas dire qui est qui ! »
Pour sa troisième année, l’UEMA d’Oyonnax a trouvé un fonctionnement qui lui est propre et a développé ses outils de travail. « J’agrémente ces activités par une dimension éducative pour travailler la communication, le jeu, les interactions sociales… » résume Anne-Laure Velon. Pour elle, le rôle de l’éducateur est d’observer le comportement de l’enfant pour adapter les activités à ses particularités, ses besoins. L’éducatrice met aussi en place des « protocoles » sur des domaines comme la propreté ou l’alimentation. Ils déclinent un objectif précis tel que manger seul en plusieurs étapes : s’installer à table, tenir ses couverts…
Le travail d’observation se concrétise par des grilles d’évaluation des compétences. « Tout est coté ! Ça montre où en est l’enfant et où on veut l’emmener. À chaque activité, on coche pour savoir s’il a réussi, s’il y a eu de la guidance, un renforçateur, ce qu’il a aimé », décrit Anne-Laure Velon. Elle accompagne aussi l’enseignante et la psychologue à remplir les livrets d’évaluation.
Partout, le travail d’équipe est essentiel. « Ça nous permet de voir des choses différentes. Chacun a son éclairage, son expérience », pense Céline Bedu. La taille humaine de l’UE et la dynamique collective favorisent les approches innovantes. L’Unité d’Enseignement Elémentaire pur Autistes de Tenay organise des goûters chaque semaine qui sont l’occasion pour Céline Bedu d’emmener les enfants faire les courses pour choisir ce qu’ils aiment. Et le vendredi après-midi, place à la luge pour se relâcher.
L’objectif de l’UEA est d’inclure les enfants en classe ordinaire le plus possible, toujours en présence d’un éducateur ou d’un AES. La durée et la fréquence varient selon les capacités de chacun. « C’est réfléchi et préparé : on sait pourquoi on part en inclusion et ce que l’on va faire. On travaille avec les enseignants pour adapter les activités faites en classe », insiste Anne-Laure Velon.
À l’école Daudet Pagnol, les enseignants sont en demande et les élèves accueillent facilement leurs camardes de l’UEMA. « Ils sont très curieux. Pour eux, le handicap n’existe pas. » À Tenay, le profil des enfants rend l’inclusion plus délicate. « Nous n’avons qu’une jeune qui peut intégrer une classe pour de l’art plastique et du sport. Elle est trop contente de partir avec son cartable et sa trousse. Les élèves sont très bienveillants », raconte Céline Bedu.
Les familles occupent une place centrale. Le matin et le soir, les équipes ménagent un bref moment pour échanger et les évènements de la journée sont retracés dans un cahier de liaison. À Oyonnax, pour créer du lien, certaines semaines de vacances sont consacrées à des activités associant les familles.
Le plus important reste la guidance parentale. Chaque semaine, un binôme éducateur/AES accompagne et est en appui auprès des familles. « L’idée est d’apporter un regard extérieur et des outils de la classe, de les aider à adapter le domicile, de travailler les liens avec la fratrie, le jeu, les repas… », explique Anne-Laure Velon. La fréquence des visites varie selon les profils et les besoins. Pour les professionnels, c’est aussi une chance de mieux comprendre les jeunes. « On y va en répondant à leurs demandes. On a toujours des astuces : pictos, emplois du temps structuré… Les parents sont preneurs. Et on ne peut pas avancer sans eux ! Si un mode de communication n’est utilisé qu’à l’école, ça ne marchera pas. »
Si Anne-Laure Velon a toujours travaillé dans le handicap, elle a côtoyé des publics très variés dans différentes structures. « Je pense qu’au bout de cinq ans, un éducateur a besoin de changer de service, de se remettre en question de découvrir un autre public. »
Arrivée dans la région il y a huit ans, Céline Bedu a commencé en foyer d’accueil médicalisé. Après une formation d’aide-soignante, elle travaille deux ans en intérim, alternant ce nouveau poste et celui d’AMP : « j’ai appris beaucoup de choses. » Elle rejoint l’UEEA à son ouverture, après 18 mois aux appartements de l’IME Dinamo pro.